Jules Grandjouan
"Cheminots syndiquez-vous.
Est-il juste que ceux qui ne risquent rien aient tout et que ceux
qui risquent tous les jours, leur vie, n'aient rien ?"
Affiche pour le Syndicat national de chemins de fer, 1910 Collection Langevin
Lapproche picturale de Grandjouan
dans sa lutte contre le capitalisme est très didactique : dun
seul coup dil, on reconnaît lexploiteur de
lexploité. Son combat rejoint celui de la lutte de deux
classes opposées, opposition qui se retrouve dans la dualité
des compositions et des représentations.
Le capital est symbolisé par la présence du coffre-fort
ou diabolisé sous les traits dune pieuvre tandis que
le capitaliste est caractérisé par un ensemble déléments
symboliques (hauts de forme ou cigares). Il a le ventre gras, parfois
gonflé comme un ballon.
Depuis Daumier et son banquier ventripotent, l'accumulation de l'or
est accumulation de graisse. La figure du bourgeois se met en place
: celui qui mange et boit sans faim, sans soif. Le physique devient
une métaphore de la surabondance face au manque.
Accumuler l'argent, c'est dévorer, la nourriture comme les
hommes.
Pour Grandjouan, en effet, lorganisation syndicale est le
noyau qui canalise les actes révolutionnaires des minorités
agissantes pour aboutir au soulèvement du peuple entier. Il
le compare à une poutre bélier que les exploités
lancent contre le coffre-fort des possédants : "le bloc
de bois concentre les efforts de chacun en une force unique qui va
frapper au bon endroit". Seule la grève générale,
cest-à-dire la cessation complète de tout travail
ou la Révolution, peut entraîner les travailleurs vers
leur émancipation. Grandjouan représente ce jour "j"
comme lunion de la classe ouvrière toute entière
qui se bat. La représentation du peuple armé de pelles
et de pioches suggère un combat sans merci car la Révolution
pour Grandjouan se fera par la violence quil légitime
dans ses écrits : "mort à lexploiteur, mort
à celui qui tue, qui profite de la souffrance humaine. Celui-là
sest mis hors de lhumanité et na pas à
espérer de pitié de notre part".
Jules Grandjouan
Affiche pour
le Syndicat national
de chemins de fer, 1910 Collection Langevin
"Public apprend
que chaque semaine les accidents de travail tuent trois des nôtres
et en blessent quinze, et la chair à tampon est pour rien car
nous avons des salaires dérisoires.
Aussi public, sois sympathique à tout ce que nous pourrons
tenter pour améliorer notre sort et, par la même, assurer
ta sécurité."