L'exposition
Points de vue sur l'affiche française
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Ce que j'aime dans l'affiche française, c'est sa vitalité et sa quête permanente de sens et démotion plastique, pour définir son rayonnement, pour évoluer et se surpasser. Liée aux meilleures traditions du passé en France, elle a su s'ouvrir aux courants internationaux. Aujourd'hui, après une longue période de silence, on peut parler réellement d'une nouvelle génération d'affichistes français.
Marsha Emanuel
Responsable de la communication visuelle Cellule Design, CCI.
Centre de Création Industrielle, Centre Georges Pompidou.

 
Ne mélangeons pas les genres. Il y a des affiches politiques, des affiches publicitaires et des affiches culturelles.
Chaque genre et chaque méthode produit des styles, souvent en relation étroite avec les créations étrangères.
Dans le domaine du graphisme, depuis les années 1970 et sous l'influence des membres du groupe Grapus, eux-mêmes descendant de l'école polonaise de l'affiche (originale surtout à partir des années 1960), se multiplient des créations privilégiant le clin d'œil, la variété des supports et le jeu avec l'écriture manuelle. En ce sens, peut-être, y-a-t-il une "affiche à la française".
Laurent Gervereau
Responsable du Musée d'Histoire Contemporaine,
Hôtel National des Invalides.

 
Sous ce concept unique de l'affiche à la française, il y a beaucoup de réalités. Mais quelque chose unifie tout cela. Spontanément, je dirais qu'il y a deux grands systèmes de production : 1/ le domaine culturel, qui a appris de l'école française du début du siècle, puis de l'école polonaise et qui a trouvé son autonomie aujourdhui, et 2/ le domaine publicitaire.
Il est rare que ce soit les mêmes professionnels qui travaillent dans les deux cas. Si on dit l'affiche à la française je trouve que c'est au domaine publicitaire que cela s'applique. L'affiche publicitaire en France fonctionne plus pour son propre plaisir que par soucis d'efficacité comme aux USA. Je trouve que cela fait un paysage urbain pas déplaisant, plutôt positif même, mais très narcissique. Je ne suis pas sûr de son efficacité. Elle ne tient pas compte de l'échelle urbaine, c'est de la culture "Libé".
Dans le domaine culturel il y a moins de spécificité française. C'est un travail de très grande qualité, avec moins de traits nationaux. L'affiche culturelle française est très internationale. Elle a su apprendre des Américains comme Glaser, et des Polonais comme Tomaszewski. Elle est en train d'apprendre son autonomie.
Pour finir je dirais qu'il y a un problème grave dans la contradiction entre, d'une part le faible investissement financier en matière d'affiche par rapport aux autres pays comparables, (Italie, Allemagne, Angleterre, etc...) et d'autre part l'encombrement, la cacophonie urbaine des panneaux publicitaires. Le paysage urbain parisien est surencombré et cela tient à la non utilisation par les collectivités locales de leurs pouvoirs en matière de ce que l'on pourrait appeler un plan d'occupation de l'affichage (comme il y a un plan d'occupation des sols).
Jean-Pierre Grunfeld
Président-Directeur-Général de Vivacity,
Agence de Conseil en communication institutionnelle.
Directeur de l'Institut de Communication visuelle, Paris.

 
C'est compliqué votre question. Si vous m'aviez posé la question il y a 7 ou 8 ans, je vous aurais dit que tous les anciens affichistes, Savignac, Villemot, etc... étaient bien vieux, qu'il n'y avait pas de renouvellement et que les agences de publicité jouaient le blocage. A part Grapus, qui défrichait.
Maintenant j'ai un sentiment de renouvellement de l'affiche française mais je ne suis pas très au fait de la nouvelle génération.
Anne-Claude Lelieur
Conservateur en chef de la Bibliothèque Forney, Hôtel de Sens.

 
Pour moi, le modèle dominant de l'affiche à la française, aujourd'hui, cest Roman Cicelewicz. Il a été d'une influence considérable sur les Grapus et sur toute "l'école Grapus". Je crois que c'est dans cette veine-là, que se situe cette définition de l'affiche à la française. Pas dans la typographie. il y a des graphistes qui sont rebelles à ce modèle dominant. Les typographes ici, sont dans le désert.
Anne-Marie Sauvage
Conservateur de la Bibliothèque Nationale,
Départements des Estampes.

 
Moi je trouve que cette nouvelle école tourne le dos à la tradition française. C'est un travail qui emploie des moyens forts, tandis que les affichistes français étaient sages. Cassandre, ce nétait pas un révolutionnaire. Cette appellation d'affiche à la française est ambigüe mais accrocheuse. Cela définit bien le travail fait en France même s'il n'y a pas de lien avec la tradition.
Mais il faut dire que la France est cassée en deux. D'un côté la publicité dans le déclin complet, la médiocrité, un océan de platitude ; et de l'autre des forces qui bougent et cela est réjouissant. C'est pour l'instant, naissant mais on a déjà vu des petites actions, aboutirent à des choses importantes.
Christophe Zagrodski
Conservateur au Musée de la Publicité, Paris.